Territoire résilient – construisons des ponts avec la communauté internationale

La notion d’évènement catastrophique 

Si nous définissons une catastrophe comme une perturbation grave du fonctionnement courant d'une société en raison de l'impact d'un événement physique, biologique ou humain défavorable, alors la pandémie et les effets du COVID-19 pourraient être décrits comme un désastre et, plus encore, comme une catastrophe.

Le terme catastrophe est utilisé pour classer les situations où les organisations qui font face aux urgences (police, pompiers, services de sauvetage et de santé) sont débordées ou s'effondrent. De ce point de vue, la pandémie du COVID-19 peut être qualifiée ainsi, au moins dans les contextes où les systèmes de santé publique et les services d'urgence ont été mis à rude épreuve et, dans certains cas, ont été testés au-delà de leurs limites.

Il n'est pas nouveau que lors d'une catastrophe, les défaillances et les inégalités structurelles d'un système deviennent évidentes. En d'autres termes, les gens ne meurent pas à cause des tremblements de terre, mais plutôt à cause de la mauvaise conception des maisons construites qui s'effondrent lors de forts séismes.

Bien qu'il puisse sembler que nous n'ayons jamais connu de catastrophe semblable à celle du COVID-19, l'humanité a déjà vécu des circonstances similaires (pandémies, guerres et crises économiques) dans lesquelles nous avons eu besoin d'une coopération nationale et internationale.

 

La résilience urbaine face à la crise

Aujourd'hui, plus de 55 % de la population mondiale vit dans des zones urbaines, une proportion qui devrait atteindre près de 70 % d'ici 2050. La plupart de l’activité économique globale est concentrée dans ces centres urbains.

Voici donc notre nouvelle réalité : une population majoritairement urbaine, des changements constants, surprenants et d'un grand impact socio-économique. Les experts prédisent l'arrivée des nouveaux cygnes noirs[1] dans un avenir proche et nous devons nous y préparer.

Le changement climatique engendre des menaces aiguës et chroniques qui font des victimes, détruisent des biens et mettent nos sociétés au défi. Tous ses composants sont concernés et doivent travailler ensemble pour faire face à ces menaces : le secteur public et le secteur privé (petites et grandes entreprises, ONG, universités, etc.). Nous avons tous intérêt à améliorer notre résilience, notre capacité en tant qu’individu, communauté ou ville à nous adapter aux conditions changeantes et à résister aux chocs tout en conservant nos fonctions essentielles. 

Des mesures doivent être prises et des efforts d'adaptation mis en œuvre dès aujourd'hui ! Les défis sont tous très réels (financiers, techniques, politiques) mais peuvent être résolus, car cette résilience ne peut pas s’atteindre sans changer de manière significative la façon dont les villes gèrent les espaces urbains.

 La création d'un environnement urbain durable et résilient nécessite les efforts de diverses parties prenantes, notamment les décideurs des administrations locales, les fonctionnaires municipaux, les départements, les gouvernements centraux, le secteur privé, la société civile, les ONG, le monde associatif, les instituts de recherche et les établissements d'enseignement supérieur.

Il existe aujourd'hui de nombreux réseaux et des communautés dans le monde entier qui promeuvent une culture de résistance à la prévention des catastrophes et des citoyens responsables qui comprennent ces risques. Ces communautés soutiennent l'apprentissage mutuel et le partage d'expériences clés afin d'encourager tous les acteurs publics et privés à participer activement à ces initiatives.

Parmi ces initiatives, plus de 4300 villes et municipalités participent à la campagne des Nations unies « Making Cities Resilient 2030 » (MCR 2030) qui promeut des stratégies locales de réduction des risques ainsi que la mise en œuvre du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe et les Objectifs du Développement Durable (ODD).

Il existe d'autres organisations telles que C40 Cities, un réseau de mégapoles mondiales engagées dans la lutte contre le changement climatique, et la Fondation Rockefeller, dont le programme « 100RC » aide les villes du monde entier à mieux résister aux défis sociaux, économiques et physiques du XXIe siècle.

Toutes ces structures offrent une excellente occasion de partager les bonnes pratiques et les enseignements tirés de la gestion des risques et des catastrophes, mais surtout de la construction de villes résilientes et de sociétés plus prospères et durables. L'adoption de ces pratiques peut être considérée comme un avantage concurrentiel pour les communautés et leurs habitants, y compris dans le contexte de cette nouvelle crise sanitaire.

 

Se réinventer, l’essentielle riposte du secteur privé 

La pandémie du COVID-19 et ses implications sanitaires, sociales et économiques soulignent l'importance de la responsabilité sociale des entreprises (RSE). Le rapport « Business Leadership Brief for Healthy Planet, Healthy People » récemment publié par le Global Compact des Nations Unies, souligne le lien absolu entre le climat, la santé et l'économie, le tout dans la logique de l'Agenda 2030 et les ODD. 

Selon Lise Kingo, directrice exécutive du Pacte Mondial des Nations Unies, il est important de comprendre et de gérer la « relation entre le changement climatique, la dégradation de nos systèmes naturels et la santé humaine ». Ainsi le rapport met en évidence la manière dont l'activité humaine affecte le climat et la nature, qui à leur tour influencent la santé et le bien-être de l’humanité et, par conséquent, la productivité et le développement socio-économique.

Le réseau espagnol du Pacte Mondial affirme que « l'urgence sanitaire actuelle ne peut nous faire oublier le sens global de la santé et le rôle important que joue le secteur privé dans ce domaine. Il s'agit de reconnaître les dommages que les entreprises peuvent causer aux personnes et à la planète et, en retour, de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour les réduire. En ce sens, la recherche et la mise en œuvre des nouveaux modèles innovants sont cruciales pour que les générations futures puissent vivre dans un monde meilleur ».

La RSE aide à identifier et à anticiper les risques mondiaux et à renforcer la résilience des organisations. Le changement climatique, les grandes inégalités et la nécessité de prendre soin de la santé et du bien-être des personnes et de la planète sont une constante de la feuille de route mondiale définie par les Nations Unies. Les entreprises qui ont intégré le développement durable dans leurs stratégies se sont montrées plus résistantes face à la pandémie [2].

Le secteur privé doit profiter des alliances, de la capacité d'adaptation, d'innovation et de transformation dont il a fait preuve ces derniers temps pour faire face aux nouvelles crises, qu'elles soient économiques, sociales ou climatiques, en intégrant toujours des critères de développement durable dans ses décisions.

La pandémie a révélé la vulnérabilité et l'épuisement du système actuel, mais elle a également montré les changements que nous pouvons apporter pour nous préparer à des situations comme celle que nous connaissons actuellement ou pour les prévenir. Peut-être devrions-nous arrêter de parler de RSE mais plutôt de stratégies d'entreprise responsables basées sur la fusion des domaines de la stratégie et de la RSE et sur l’inclusion de nouveaux paramètres dans la gestion des risques ?

Selon Simon Sinek (professeur à l'université de Columbia et fondateur de SinekPartners), il ne s'agit pas d'une période sans précédent ; il existe de nombreux cas où un changement inattendu a entraîné la faillite de nombreuses entreprises et en a poussé d'autres à sortir plus fortes et à se réinventer.

Pour le gourou des affaires, les entreprises doivent désormais se demander comment exercer leur activité dans un monde différent, non pas simplement pour « s’en sortir » avec de simples alternatives mais véritablement, comment aller bien au-delà de cette logique d’adaptation. En d’autres termes, les entreprises doivent passer d’un état de survie à un état de transformation. 

 

Dilia Peña Medina

Responsable Relations Internationales du World Forum for a Responsible Economy



[1] La théorie du cygne noir de Nassim Taleb représente un événement ayant une faible probabilité de survenir, mais qui, s'il se produit, a des conséquences d'une portée considérable.