Impact du changement climatique dans les Hauts-de-France : retour sur notre conférence

À l’occasion de sa première rencontre adhérents et partenaires, Réseau Alliances proposait une conférence sur le changement climatique dans les Hauts-de-France. En présence du CERDD, qui a pu dresser un état des lieux de la situation, et de deux entreprises engagées, Le Fournil Bio et Rabot Dutilleul, les participants ont pu bénéficier de clés de lecture sur l’impact du changement climatique dans la région.

 

220307 conf climat« Nous ne sommes pas dans une bonne trajectoire en termes de dérèglement climatique » annonce Joséphine Raynauld, chargée de Mission Ressources Climat au CERDD. Depuis plusieurs années déjà, les effets du changement climatique se font ressentir dans la région. Les températures ont augmenté de deux degrés en moyenne entre 1955 et 2017 à Beauvais ou à Lille, l’élévation du niveau de la mer a crû de plus de 10 centimètres à Dunkerque entre 1956 et 2018. Le nombre de jours de gel diminue (trois jours en moins), impactant notamment le secteur agricole. « Aujourd’hui, le changement climatique vient intensifier tous les types de risques déjà existants, entrainant une chaine d’impacts : la ressource en eau va, par exemple, être impactée, tant en qualité qu’en quantité. Les débits des cours d’eau vont être modifiés, avec des concentrations plus fortes de polluants ». Florent Leroy, dirigeant du Fournil Bio, observe déjà les conséquences de ces bouleversements. « Sur la céréale, nous avons des impacts énormes. La qualité du blé est liée à la qualité de l’eau. S’il pleut trop, les protéines ne restent pas dans les céréales. Les sols s’érodent, il n’y a plus de vie. Pourtant, il existe des solutions : les sols bios sont vivants, il faudrait également se concentrer sur de nouvelles céréales, plus résilientes et qualitatives, mais nous sommes en retard ». 

 

Pour enrayer ces effets, l'Accord de Paris fixe comme objectif de limiter le réchauffement climatique à un niveau bien inférieur à 2 degrés, de préférence à 1,5 degré Celsius, par rapport au niveau préindustriel. « Le seuil des deux degrés pose un seuil d’incertitude : au-delà, nous ne contrôlons plus les impacts directs et indirects. Certes, nous pouvons faire des projections, mais avec des degrés d’incertitude » ajoute Joséphine Raynauld. Deux leviers peuvent ainsi nourrir l’action climatique : l‘atténuation et l’adaptation. L’atténuation est le fait de diminuer son impact, de réduire ses émissions de gaz à effet de serre « en disant non à certains usages ». L’adaptation est le fait d’ajuster ses activités et ses modes de vie à des impacts déjà visibles. « Il faut agir sur ce que l’on maitrise déjà, sur ses impacts directs en réfléchissant à une stratégie d’adaptation. Il s’agit de prendre conscience de l’ampleur du phénomène et des actions à mener, de diagnostiquer ces impacts sur son activité et son territoire, et de planifier des actions qui expliquent ce à quoi nous devons nous adapter à court puis à long terme ». 

 

Convaincre le plus grand nombre

Cette stratégie d’adaptation, Rabot Dutilleul s’y est penché. L’entreprise a travaillé sur les leviers dont elle disposait pour agir efficacement en faveur de la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre. « Nous avons signé un manifeste bas carbone qui amène des actions concrètes autour de la diminution du carbone que nous produisons. Nous avons des leviers sur nos modes de fonctionnement, nos bureaux, les économies d’énergie, les mobilités. Nous utilisons des matériaux biosourcés, à l’image du béton de chanvre que nous testons. Nous essayons également d’encourager la réhabilitation plutôt que la construction neuve, en essayant d’influencer nos parties prenantes en ce sens » explique Carole Catry, Secrétaire Générale Déléguée chez Rabot Dutilleul. L’entreprise travaille ainsi sur l’analyse du cycle de vie de ses bâtiments et espère faire bouger les lignes sur la réhabilitation et les nouvelles manières de construire. « Tout le monde n’est pas toujours convaincu : on essaye d’y contribuer en montrant ce sujet de l’urgence climatique. Nous menons également des opérations de sensibilisation auprès des collaborateurs pour qu’ils puissent se rendre compte de ces enchainements de situations. Car l’énergie la plus durable, c’est celle que l’on ne produit pas ».

 

Car la sensibilisation, la prise en compte de ces enjeux est primordiale. Mais celles-ci se confrontent souvent à la réalité du terrain. « Parfois, l’adaptation est une source de conflit. Au Fournil Bio, nous avons des camions qui nécessitent d’être rechargés au gaz. Mais il n’y a qu’une seule borne sur la métropole. Il faut donc que les collaborateurs se déplacent spécifiquement à cet endroit, cela impacte leur quotidien. Même chose pour l’emballage : nous avons fait le choix du 100 % compostable mais cela se déchire, c’est plus cher. L’adaptation auprès des équipes, ce n’est pas évident à porter tous les jours en tant que dirigeant » ajoute Florent Leroy. Car c’est bien de cela dont il s’agit : contribuer, à son niveau, à la neutralité carbone en embarquant l’ensemble de ses parties prenantes. « Quand on s’empare de ce sujet, il faut se demander comment faire plus, comment faire mieux » conclut Joséphine Raynauld.