La loi AGEC : un tournant pour les entreprises vers une économie circulaire

En février 2020 était adoptée la loi Anti-Gaspillage pour une Economie Circulaire (AGEC), visant à réduire le gaspillage, promouvoir une économie circulaire, et ainsi favoriser la transition écologique. Cette loi, portée par Elisabeth Borne et Brune Poirson, est notamment venue renforcer les exigences envers les entreprises en matière de responsabilité sociétale, les incitant fortement à s’engager activement vers une économie plus durable. En 2023, cette avancée majeure dans la réglementation environnementale continue de jouer un rôle clé au sein de notre économie, dans la mesure où de nombreuses mises à jour significatives ont vu le jour depuis son adoption.

L’occasion pour Raphaëlle DU FAYET, Chargée de Relations Institutionnelles au sein de l’association Dons Solidaires, et d’Adam MANSSOURI, Chargé d’affaires boucles innovantes d’économie circulaire au pôle de compétitivité TEAM2, de revenir sur les changements de cette loi pour les acteurs économiques au cours d’un webinaire sur le sujet. Retour sur les principaux objectifs de cette loi et de leur impact sur les entreprises et la société, afin de mieux saisir les défis et opportunités qu’elle revêt.

Comprendre ses objectifs globaux

Mise en place pour mieux agir face aux défis environnementaux majeurs auxquels nous sommes confrontés, la loi AGEC comporte divers objectifs en lien direct avec les modes de production et de consommation actuels. Limitation des déchets et préservation des ressources naturelles, de la biodiversité et du climat, sont mises au cœur de chacune des mesures des 130 articles de cette dernière.

L’un des aspects notables de cette loi concerne la réduction du gaspillage alimentaire et la lutte pour le réemploi solidaire. Elle encourage à une utilisation plus responsable des denrées alimentaires, en imposant aux grossistes de donner leurs invendus aux associations caritatives. Il en est de même pour les invendus non-alimentaires neufs : les entreprises sont tenues de réemployer, réutiliser ou recycler ces derniers, les incitant fortement à se rapprocher d’associations de lutte contre la précarité et structures de l’économie sociale et solidaire (ESS), sanctions à l’appui. « Il faut d’abord envisager le don, et voir si l’on a la capacité de réutiliser ou de recycler ces produits », précise Raphaëlle, les produits de première nécessité ne pouvant être recyclés.  

La loi AGEC introduit également la volonté de sortir du plastique jetable, et prévoit notamment la fin de la mise sur le marché des emballages plastiques à usage unique d’ici 2040. Réduction, réemploi et recyclage sont donc les maîtres-mots du décret 3R pour la période 2021-2025. Entre interdiction de la vaisselle jetable et autres objets en plastiques à usages uniques, et déploiement des dispositifs de vrac, une fin progressive de ce type d’emballage est en cours.

De plus, dans une logique de lutte contre l’obsolescence programmée, les fabricants doivent désormais indiquer la durée de disponibilité des pièces détachées de leurs produits électroniques et électroménagers. Cet indice de durabilité encourage la réparation et la prolongation de la durée de vie des produits, et sera étendu à d’autres critères au 1er janvier 2024. « La maîtrise des informations, données et processus est essentielle. La connaissance et l’analyse du cycle de vie permettent de connaître le processus, mais aussi l’impact associé à chaque consommation. Cela est bénéfique pour s’améliorer à chaque étape et réduire drastiquement son impact. La finalité est de pouvoir développer un modèle économique et une transition écologique qui soient le plus pérenne possible. » partage Adam à propos des axes de réflexion de TEAM2 pour répondre aux objectifs de l’économie circulaire.

Enfin, la loi attend des entreprises de mieux informer les consommateurs, et de revoir leurs modes de production au regard des intentions évoquées précédemment, en étendant les mesures et régimes de sanction à de nombreux types de producteurs et filières dans les années à venir.  « L’idée est de réfléchir aux débouchés de demain, de sorte à avoir une valorisation maximisée. » explique-t-il. La transparence de leurs émissions à effet de serre fait elle aussi partie intégrante de cette nouvelle gestion environnementale.

 

Une loi créatrice d’opportunités et de défis pour les entreprises

La loi AGEC a un impact significatif sur les entreprises, et concerne l’ensemble des acteurs économiques.

Ses diverses obligations ont un objectif clair pour ces derniers : réduire leur impact sur l’environnement, et favoriser une meilleure prise en compte des enjeux sociaux dans leur stratégie. Ils sont invités à reconsidérer leurs méthodes de production, de sorte à minimiser leur impact environnemental et sociétal, en innovant et repensant leur modèle économique. « L’objectif est de transmettre un changement d’idée et de réflexion : la valorisation de ressources, l’impact environnemental, mais aussi de l’économie des produits, c’est-à-dire de consommer en fonction des différents usages que l’on aura du produit, en sachant dès le départ comment les valoriser. » explique Adam.

Elle représente donc un réel défi pour bon nombre d’entreprises, avec, à titre d’exemple les coûts de mise en conformité, l’ensemble des ajustements logistiques nécessaires, ou encore la mise en place d’un véritable changement culturel au sein de ces dernières.

Cependant, elle offre également des opportunités d’innovation et de différenciation sur le marché. « Actuellement, beaucoup de débouchés n’existent pas encore. La création de nouvelles technologies et de filières sera essentielle. De notre côté, nous amenons les acteurs à un niveau de compétences pour leur permettre de répondre à différents marchés, mais aussi de développer de nouvelles activités. »  

En outre, cette loi semble encourager le renforcement de la démarche de responsabilité sociétale des entreprises (RSE). « Nous nous rendons compte qu’avec la pratique, cette loi AGEC, initialement perçue comme une contrainte, devient une évidence à partir du moment où elle est mise en place dans l’organisation. Nous avons vu en quelques années, des entreprises qui au départ, optimisaient uniquement leurs invendus, créer une véritable politique RSE. C’est une démarche très vertueuse. » rapporte Raphaëlle. Des mesures qui sont également venues inciter les entreprises à se réorganiser. « Du côté des dons, c’est une obligation devenue un moteur pour agir et valoriser ses invendus. Beaucoup d’entreprises donnaient depuis très longtemps, mais cela s’est structuré avec cette loi, en institutionnalisant et encadrant le don auprès de structure comme la nôtre. » poursuit-elle.

De plus, elles viennent sensibiliser les consommateurs et salariés à l'importance de la durabilité, ce qui peut créer une demande croissante pour des produits et des services respectueux de l'environnement, ou venir renforcer l’engagement de collaborateurs sensibles à cette cause. « Nous savons combien les attentes internes des salariés sont fortes quant à l’action de leur entreprise pour la société et la planète. »

La mise en place de pratiques éco-responsables peut également permettre de réduire les coûts liés à la gestion des déchets, à la consommation d'énergie, ou encore à l'utilisation des matières premières. « Il faut aussi avoir en tête la valeur fiscale des invendus. Le mécénat, lors du don de produit, permet notamment de bénéficier de 60% du coût de revient de ces derniers. Lorsque l’on s’adresse à des associations reconnues d’utilité publique, l’exonération de régularisation de la TVA est également significative pour l’entreprise. » ajoute la salariée de Dons Solidaires.

Enfin, au-delà d’accéder à des financements durables pouvant attirer des partenaires partageant ces mêmes valeurs, en anticipant les évolutions législatives, les entreprises peuvent éviter des sanctions potentielles et s'adapter plus facilement aux nouvelles contraintes réglementaires.

 

En somme, la loi AGEC représente une étape importante dans la transition vers une économie plus durable en France. En introduisant des changements significatifs visant à promouvoir une économie circulaire et à réduire l’impact des entreprises sur la planète, elle les pousse à revoir leurs pratiques et à adopter une approche plus responsable envers l'environnement. Bien que des défis subsistent, elle ouvre également la porte à de nouvelles opportunités commerciales et à un avenir plus respectueux de la planète, pouvant les aider à prospérer dans un monde en pleine mutation.

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